ppp-article-1-1024x720 Les Dynamiques de la propriété privé au Burundi : Quels défis liés au Cadre légal de la propriété foncière ?

La propriété privée foncière a été pendant longtemps fondée sur le droit coutumier. Mais pendant toute cette période, le cadre légal n’a pas été à mesure de nous mettre sur les rails d’un vrai développent. Notre Blogueur Jean Acutis ISHIMWE nous montre les défis liés à cette faible situation juridique.

Propriété privé quid ?

La propriété est le droit de disposer d’une chose d’une manière absolue et exclusive, sauf les restrictions qui résultent de la loi et des droits réels appartenant à autrui. Et pour les propriétés foncières, le code foncier du Burundi précise en son article 16, que le droit foncier est le droit d’user, de jouir et de disposer d’un fonds d’une manière absolue et exclusive, sauf restrictions résultats de la loi et des droits réels appartenant à autrui. Les terres relevant du domaine privé relèvent de la gestion foncière du droit commun.

En effet, le droit de propriété est un droit de l’homme par excellence consacré par la DUDH en son article 1, par la Charte Africaine des droits de l’homme et des peuples en son article 14. Le droit de propriété est consacré par la Constitution du Burundi au titre des droits fondamentaux par l’article 36 de la Constitution qui dispose que : « Toute personne a droit à la propriété. Nul ne peut être privé de sa propriété que dans les cas et de la manière établie par la loi et moyennant une juste et préalable indemnité ou en exécution d’une décision judiciaire coulée en force de chose jugée ». Mais la question qui reste en suspens, c’est cet usage de l’adjectif absolu qui apparaît dans toute définition de la propriété privée s’il ne peut exister aucune limité de façon à en disposer de son bien avec liberté pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou les règlements.

Le cadre légal de la propriété foncière au Burundi

Le Burundi traditionnel considérait la terre comme un patrimoine collectif inaliénable administré par le Mwami et ses délégués sur base du droit coutumier. Les burundais accédaient au droit à la propriété privée ne fut qu’en 1960, à la veille de l’indépendance, sans pour autant remettre en question les déséquilibres structurels entre dirigeants et dirigés dont se sont saisies les nouvelles élites politiques. (Voir GAHAMA J., Le Burundi sous administration belge, Paris, 1986). Avec le code foncier de 1986, le législateur Burundais a gardé l’illusion du colonisateur qui croyait au passage généralisé de la coutume au droit écrit en matière foncière. C’est pourquoi, le code foncier de 1986 de même que la législation coloniale antérieure ont été décriés comme des instruments de spoliations du passé. Au Burundi, depuis l’indépendance, les officiels locaux s’attribuent des terres domaniales durant leur occupation du pouvoir. Jusqu’aujourd’hui, cette pratique chez certains responsables politiques n’a pas complètement disparue. Durant cette période, les burundais n’avaient pas le sens de la sécurité foncière car l’enregistrement foncier était l’apanage des gens riches.

A cette époque du code de 1986, des litiges fonciers représentent 71,90% de toutes les affaires soumises aux cours et tribunaux. Cette situation conflictuelle qui était même qualifié à l’époque de « bombe foncière » s’amplifiait par les litiges entre les rapatriés, rentrant dans leur pays, et ceux occupant « leurs parcelles historiques » que les résidents considèrent comme les leurs après l’usucapion de 30 ans (RCN justice et démocratie, Statistiques judiciaires Burundaises, rendement, délais et typologie des litiges dans les tribunaux de résidence, Bujumbura, décembre 2009, p.25). Le besoin de la révision du code foncier se fait aussi sentir par les Accords d’Arusha pour la paix et la réconciliation au Burundi du 28 août 2000 qui stipulait au Protocole 4, article 8 « Le Code foncier du Burundi doit être révisé afin de l’adapter aux problèmes actuels relatifs à la gestion des terres ».

Cependant, la loi N°1/13 portant révision du code foncier promulguée le 9 août 2011 a suscité beaucoup d’espoir, car elle a contribué dans la résolution des conflits fonciers surtout familials. Le code de 2011 a présenté beaucoup d’améliorations surtout en ce qui est du système allégé de certification foncière auprès des services fonciers communaux. Même si le code foncier de 2011 n’a pas apporté des innovations en ce qui est de la succession des femmes, il s’avère important de noter que la question de superposition des droits successoraux a été résolue par la possibilité de certification collective prévue par le code foncier en son article 380.

Une législation faible et éloignée des réalités concrètes du terrain

La question foncière revêt un caractère social et culturel dans le sens où la terre n’est pas seulement une richesse économique mais un élément de la culture, une partie de la vie d’une famille et de son histoire. Beaucoup accepte de tout risquer pour ne pas perdre un procès foncier qui représente à la fois un point d’honneur et un défi familial. Je me souviens d’un procès sur la propriété familiale à laquelle j’ai assisté qui passe plus de vingt ans dans les tribunaux. Ce qui est impressionnant, c’est qu’on a acheté et racheté ces propriétés au cours même du procès et pour le moment c’est un village de maisons. Est-ce que ces propriétés sont encore protégées par la loi qui est pourtant attendue à remettre les choses en ordre ? Certes, il y’a la nécessité d’une justice forte capable de contribuer dans la question de la résolution des conflits fonciers. Oui, les abahuza qui interviennent dans les affaires civiles aident à résoudre les conflits mais ils doivent refléter l’image d’une justice indépendante et impartiale.

En plus, il a été constaté que parfois l’Etat abusait des expropriations notamment en expropriant des populations avec une indemnité qui ne répond pas à la valeur actuelle de la monnaie par manque d’une législation claire et efficace qui protège l’exproprié. Un autre problème qui se remarque au droit foncier au Burundi, c’est un long processus administratif et des montants exorbitants dans l’acquisition des titres de propriété. Ce qui est une entrave au développement. Beaucoup de famille au Burundi avec des grandes propriétés foncières végètent encore dans la pauvreté car ils ne savent pas comment tirer profit de cette propriété. D’abord par la sécurisation à travers la certification foncière mais aussi accéder à des crédits en hypothéquant cette propriété.

Bref, la propriété privé est la clé de voute de la prospérité de notre pays mais il faut un cadre légal structuré et inclusif qui protège les hommes de basse condition.

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